Compensation du handicap chez l'enfant: le répit

La dimension « familiale » de la prise en charge d’un handicap a été à l’origine du développement du concept de « répit » pour les aidants. La notion de répit a été définie par certains comme la prise en charge temporaire physique, émotionnelle et sociale d’une personne dépendante dans le but de permettre un soulagement de son aidant principal. En effet, il a été mis en évidence, dans de nombreux travaux, que le « fardeau » que peut représenter la situation de handicap sur l’aidant principal est souvent élevé et peut avoir un impact sur son niveau de stress, d’anxiété et de dépression. Le « répit » est donc apparu comme une nécessité pour les acteurs du monde du handicap.

Cette notion de répit, dans le cadre qui nous intéresse, concerne avant tout la famille et les proches d’un enfant en situation de handicap. Ces personnes sont en effet celles qui, dès la naissance, prennent en charge les besoins spécifiques de l’enfant en situation de handicap, du moins tous ceux que les institutions ne gèrent pas. Il apparaît en effet que, si les gestes techniques dont peut avoir besoin un enfant en situation de handicap sont en général financièrement et pratiquement pris en charge par la société (encore que pas assez diront certains) la vie quotidienne revient à la famille.

C’est tout ce «reste» qui modifie le cours d’une vie, qui fait que ces familles ne sont «pas comme les autres».
C’est la mère de famille obligée d’abandonner sa carrière et son métier pour s’occuper de son fils, qui a besoin d’une surveillance constante. Ce sont ces familles qui ne partent plus jamais en vacances, parce que c’est trop cher, et surtout si compliqué. C’est ce frère qui aimerait voir ses parents assister à son match de foot. C’est ce père qui a ruine sa santé à force de ne jamais s’arrêter.

Personne n’est seulement père ou mère. On est aussi homme, femme, citoyen... Le répit, tout le monde sait ce que c’est... C’est ce temps que l’on prend rien que pour soi, parce que personne n’est seulement mère ou père. On est aussi femme, homme, citoyen, ami, etc.

Mais le répit est aussi un droit parce que c’est une nécessité. Par ces moments sans stress passent l’épanouissement personnel, la cohésion d’une famille ou l’éducation d’un enfant. Le « Droit au Répit », c’est tout simplement le droit de souffler un peu. Que pendant un moment, quelques jours, voire quelques heures, la vie d’une famille ne soit pas conditionnée par le seul handicap d’un des leurs. Sans culpabilité ni privation supplémentaire.

En France, le Droit au Répit, et notamment celui des aidants familiaux auprès des personnes handicapées a été officiellement reconnu en France par la loi du 11 février 2005, dite «Loi pour l’égalité des droits et des chances». Ce droit existe donc bel et bien. La loi dit ce vers quoi il faut tendre, mais ne précise pas comment, ni avec quels moyens. La notion reste méconnue, même au sein des familles concernées. Bien souvent, comme le montrent les résultats des rares enquêtes, les familles ont déjà tellement adapté leur vie aux besoins de l’enfant handicapé qu’elles ne réalisent pas qu’elles auraient besoin de répit.

En parallèle, les personnes souhaitant effectivement trouver un peu de répit, de façon ponctuelle ou plus régulière, ne trouvent pas les structures dont elles auraient besoin. Pourtant, des solutions existent déjà, mais en nombre insuffisant. En outre, elles sont très peu connues, onéreuses pour la plupart et surtout rarement adaptées aux besoins réels, différents selon chaque enfant et chaque famille.

Effectivement et bien qu’encore moins souvent envisagé, le Droit au Répit, c’est aussi celui des enfants en situation de handicap. Considérés comme des personnalités en évolution, les enfants en situation de handicap ont, à l’instar de tous les enfants, le droit d’avoir leur univers personnel, de construire leur place dans la société. Le droit aussi de ne pas avoir leur mère ou leur père «sur le dos» toute la journée.

Aussi, à l’issue de la conférence de la famille de juillet 2006, le gouvernement français a décidé de reconnaître pleinement et de soutenir les aidants familiaux de personnes âgées et de personnes handicapées. C’est pourquoi, en complément d’une reconnaissance juridique des aidants auprès des personnes âgées, de la création d’un congé de soutien familial, de l’instauration d’un droit au répit, de la création d’un carnet de l’aidant familial et de la mise en œuvre d’un dispositif de valorisation des acquis de l’expérience de ces aidants, il a été décidé de développer l’accompagnement, de travailler plus étroitement avec les aidants familiaux et de les considérer comme des partenaires et des experts associés.

A noter : Ce que dit la loi
Art. L. 114-1. — «Toute personne handicapée a droit à la solidarité de lensemble de la collectivité nationale, qui lui garantit, en vertu de cette obligation, laccès aux droits fondamentaux reconnus à tous les citoyens ainsi que le plein exercice de sa citoyenneté... A cette fin, laction poursuivie vise à assurer laccès de lenfant, de ladolescent ou de ladulte handicapé aux institutions ouvertes à lensemble de la population et son maintien dans un cadre ordinaire de scolarité, de travail et de vie. Elle garantit l’accompagnement et le soutien des familles et des proches des personnes handicapées.»
Le Droit au Répit est défini dans la Charte européenne de laidant familial, proposée en 2007 par la COFACE Handicap* comme une nécessité fondamentale qui peut se traduire en termes de soutien, de renfort ponctuel en cas durgence, de services de suppléance et/ou de centres daccueil temporaire de qualité pour une plus ou moins longue durée selon les besoins (temps de vacances, repos santé, etc..).


1/ Ce qui existe déjà
Au niveau européen, en 2007, dans le cadre de l’année européenne de l’égalité des chances pour tous, COFACE-Handicap* a proposé la Charte européenne de l’Aidant familial. Cette charte permet de contribuer à la conciliation de la vie familiale et de la vie professionnelle grâce à un choix libre et éclairé de l’aidant. Elle présente une définition de l’aidant familial, la part de solidarité nationale et de la solidarité familiale, la
place du choix de l’aidant familial, la notion de qualité de vie, celle de Droit au Répit, etc.

En France, il faut citer le GRATH, Groupe de Réflexion et réseau pour l’Accueil temporaire des personnes handicapées. Constitué en 1997 par des parents et des professionnels pour travailler sur la problématique de
l’accueil temporaire, il a participé au groupe de travail préparatoire à l’élaboration de la circulaire du 12 mai 2005 relative à l’accueil temporaire des personnes handicapées.
Le GRATH a d’abord fait un état des lieux en réalisant deux grandes enquêtes nationales en 1999 et en 2001. Il a participé à l’élaboration de la règlementation sur l’accueil temporaire : reconnaissance du Droit au Répit pour la première fois dans un texte de loi, des structures spécifiques d’accueil temporaire, création et maintien des places d’accueil temporaire dans les structures traditionnelles, prise d’initiative face aux situations d’urgence ouvertes aux directeurs, ébauche d’un véritable dispositif d’accueil d’urgence pour les personnes handicapées.

En régions, comme par exemple à Nantes, un service de Droit au Répit a été mis en place sur une initiative du Conseil Général  en relation avec le service d’auxiliaire de vie de l’association des Paralysés de France (APF) et l’ADMER. La participation des familles faisant appel à cette aide est de l’ordre de 1,50€ par heure, le reste du coût est pris en charge par le Conseil Général. En Alsace, des associations proposent, de la même façon, une aide aux familles. L’association Regard prend par exemple en charge un enfant ou un adulte en situation de handicap pendant le temps d’un week-end, l’association Nouvel Envol propose des activités physiques et sportives auprès d’enfants en situation de handicap...

Enfin, un certain nombre d’associations de malades ou de personnes en situation de handicap propose des offres de répit : village-répit, garde, …

2/ Les limites
L’offre proposée
Les solutions proposées se heurtent toujours aux mêmes problèmes, liés au lieu de domiciliation des familles, à la nature et au degré du handicap de l’enfant. Certaines associations d’aide à domicile intervenant auprès d’un public dépendant, personnes handicapées ou âgées, offrent leurs services à quelques familles. Mais ces interventions répondent essentiellement à des besoins d’aide humaine, et non de répit.

Les familles
Une des limites majeure à l’accès au répit reste le sentiment fréquemment partagée par les familles touchées par une situation de handicap: la culpabilité. Ce sentiment de culpabilité est de plus encore plus avéré pour les mères. Le lien est en effet vraiment très fort, et il y a la culpabilité d’avoir donné naissance à un enfant handicapé. De fait, il arrive que certaines mères se disent "Il faut que j’en bave". Il leur faut se donner à l’enfant, au risque de se perdre. L’idée d’une "mission" apparaît souvent. Aussi, face à la question du répit , ces femmes pensent naturellement que cette possibilité est inatteignable. Elles déclarent même avoir cherché avec leur conjoint ou avec leurs proches quels pourraient être ces moments de répit mais ont finalement décrété qu’ il ne pouvait y en avoir. Le répit, même si, parfois, elles arrivent à en retrouver leur apparait alors comme un élément du domaine du passé ou du rêve…

Or le répit signifie, tout simplement, prendre du temps pour vivre sa propre vie et ce, sans culpabiliser, d’où l’importance de mettre en place un espace de dialogue même si la plupart insiste sur le fait qu’évoquer sa situation, ses problèmes, ses préoccupations est très difficile. Car ce n’est pas la pudeur qui empêche de parler, c’est la souffrance d’autant que dans un groupe de parole par exemple, il faut aussi entendre les autres, y compris des choses qu’on n’a pas envie d’entendre. La parole reste difficile. Il faut digérer le fait d’avoir un enfant handicapé, faire le deuil de l’enfant qu’on avait imaginé, parce qu’on ne rêve jamais d’avoir un enfant handicapé. Certains n’arrivent jamais à faire ce deuil. Parfois la réalité est trop cruelle.

Bien qu’inconscient, ce temps d’expression est néanmoins ressenti comme un besoin réel, comme une étape nécessaire à l’accès au répit…

3/ Les préconisations
Aussi, afin de pouvoir répondre aux familles et éviter des situations de crise et de rupture (placement d’urgence lors du décès ou la maladie d’un des deux parents, suicide d’un parent, infanticide, problème grave au sein de la fratrie, etc.), il apparaît clairement qu’il faut proposer plusieurs solutions de prise en charge, le tout en tenant compte du handicap et de la structure familiale.

Pouvoir laisser son enfant en situation de handicap à quelqu’un d’autre demande une confiance essentielle envers la personne qui prend le relais. Une connaissance du handicap, des compétences de soin sont des points indispensables sans lesquels la famille ne saurait prendre de répit.

Afin que la loi sur l’Egalite des chances du 11 février 2005 puisse trouver son application, des pistes de réflexions pour des solutions concrètes ont été dégagées:
·         Création d’un service de babysitting spécialisé ;
·         Mise en place de structures périscolaires après les IME ;
·         Création de structures de loisirs et de sport adapté ;
·         Plus de colonies de vacances adaptées au handicap ;
·         Plus de places en établissement ;
·         Plus d’aide financière ;
·         Mise en place d’aide psychologique pour les familles ;
·         Création d’un lien entre les écoles de formation de professionnels dans le domaine médical et paramédical et les parents ;
·         Meilleures informations administratives et scolaires ;
·         Adresses d’associations. 



En conclusion, n’hésitez pas à bénéficier des opportunités offertes, à vous mobiliser pour accroitre celles-ci, à faire part de votre expérience dans le domaine,… Marquez une pause, reprenez votre souffle et aidez les hésitants à le faire également !